Coronavirus : une manifestation foudroyante de la mondialisation libérale. En ces jours de mars 2020, l’extension mondiale de la maladie provoquée par le coronavirus entraîne des bouleversements si rapides que l’on a peine à se retrouver dans tous ces basculements qui affectent la planète. Et qui touchent fortement notre vie quotidienne.

 

Le monde bascule à l’échelle planétaire

 Avec les fermetures de frontières, les interdictions des vols, les pénuries d’équipements médicaux, de masques, de médicaments… Les déclarations apaisantes ou alarmantes, au grès des calculs politiques des dirigeants. Des
dirigeants visiblement dépassés par l’ampleur de la maladie et son caractère imprévisible.

 

Mais le monde bascule aussi à notre échelle personnelle

 Il n’est plus possible d’envoyer ses enfants à l’école. De participer à une réunion de travail. De suivre un cours à la faculté. D’aller embrasser un parent âgé en maison de retraite. De retrouver des amis. De trouver du riz, du sucre et des pâtes dans les magasins. D’aller prendre un verre au café du coin… Tous les jours, on annonce de nouvelles restrictions aux mouvements. Le filet des circulations se resserre. Comme en Italie, et avant ce pays, en Chine, à Hongkong, à Singapour…

 Le confinement total dans nos appartements est maintenant effectif en France. Et il se profile pour tous les pays d’Europe. Affectant des dizaines de millions d’habitants. Mais on le voit venir dans les pays du Sud également.

 

On a sous les yeux une manifestation foudroyante de la mondialisation libérale

 La frénésie de circulation des personnes et des marchandises, principalement par les voies aériennes, a ouvert une voie royale à la circulation internationale des personnes porteuses de ce coronavirus. Un virus au pouvoir contagieux immense. Un virus « couronné », d’où son nom ! Pas moins ! Et son expansion planétaire oblige les autorités à imposer un ralentissement planétaire à cette frénésie de mouvement.

 

Que pourrait-il sortir de ce mouvement ?

 Et si ce petit animal féroce, le coronavirus, nous aidait à enrayer le mouvement effréné de la mondialisation ?

 Certes, on peut voir toute une série d’effets négatifs à la pandémie en cours. A commencer, bien sûr, par ses effets mortifères sur la vie humaine. Mais aussi avec le renforcement des frontières, des barrières, des murs. Tous obstacles à la circulation des personnes. Les réfugiés, les migrants, seront les premiers affectés, assurément.

 

La frontière

 Et les effets dans les imaginaires, avec le renforcement de l’idée de la frontière. De la coupure, de la séparation entre « eux » et « nous ». Trump a déjà tourné sa rhétorique en accusant l’étranger. Les idéologues de droite et d’extrême droite partout dans le monde commencent à désigner le coupable. C’est l’Autre. Mais ils sont mal à l’aise (et tant mieux). Car le virus ne connait ni frontières géographiques ni de classes sociales. En France et ailleurs, le racisme antichinois s’est déchaîné, dès le début. Le racisme n’a cependant pas pris de l’ampleur, à ce stade tout au moins. Nous restons vigilants.

 

Mais d’autres effets positifs pourraient se prolonger et modifier
le visage du monde

 En freinant durablement la circulation des personnes et des biens avec des relocalisations de production. En diminuant la consommation de carburants fossiles, un bienfait pour l’environnement. On peut aussi espérer un ralentissement des flux touristiques. Ceux-ci provoquent des effets ravageurs quand ils deviennent envahissants dans les sociétés d’accueil. Et notamment le tourisme de croisière. Ce grand pollueur des mers devrait s’en trouver affecté. Et nous ne pouvons que nous en réjouir. D’autres effets économiques positifs sont attendus. Produire moins, consommer moins, dans les pays du Nord notamment. En Chine également.

 

La suprématie de l’économie et des contraintes financières est
ébranlée

 Mais c’est surtout sur le plan des représentations (des imaginaires sociaux) que les bouleversements les plus importants sont attendus. La pandémie confronte, dans l’urgence, les dirigeants politiques aux priorités vitales. La santé ou l’économie ? La vie des personnes ou la marche des entreprises ? Et/ou comment concilier les deux ? Les contraintes économiques présentées comme absolues (« There Is No Alternative ») tombent les unes après les autres. Au moins en apparence? Provisoirement?

 

Aujourd’hui, on fait mine de privilégier la vie

 On ne peut faire confiance à ces dirigeants qui ont opposé jusqu’ici l’impératif économique (et les profits des grandes firmes) aux menaces environnementales. Qui ont démantelé les services publics, notamment dans la santé et la recherche médicale.

 Les dirigeants découvrent qu’il faut privilégier la vie ?!?! OK, mais nous posons la question. La vie de qui ? Faut-il faire des choix si le système de santé devient saturé par l’afflux de malades en situation de détresse sanitaire ? Et les pauvres, ceux qui ne peuvent payer leurs soins dans les pays où la gratuité n’est pas assurée ? Et les étrangers sans papiers ? Sans oublier les personnes qui sont à la rue ? Quelle solidarité ?

 

Parce que la maladie touche toutes les classes sociales, y compris
les dirigeants politiques

 Parce que des personnels politiques sont eux-mêmes touchés, les dirigeant sont obligés de revoir l’ordre des priorités. Au moins en paroles.

 Les personnes seront soignées gratuitement « quoi qu’il en coûte » a dit le président français. Et les personnes qui ne pourront pas aller au travail seront indemnisées « quoi qu’il en coûte ». Cette parole sera-t-elle tenue ?

 Les dirigeants politiques en France redécouvrent l’importance d’un système de santé public gratuit et de bonne qualité. Ils découvrent que c’est pour le bien-être (et la survie) de tous, y compris d’eux-mêmes !

 

Coronavirus : une manifestation foudroyante de la mondialisation libérale
Le président Macron découvre les vertus de l’hôpital public gratuit et universel

 

Plusieurs milliers de lits d’hôpitaux supprimés depuis 10 ans

 Ces dirigeants, de Sarkozy à Macron en passant par Hollande, ont fait peser sur ce système hospitalier public des pressions économiques immenses. Ils ont mis des comptables aux postes de direction des hôpitaux publics pour gérer l’hôpital comme une entreprise. Eux qui ont fermé des lits (plus de 10.000 depuis 10 ans). Qui ont réduit les effectifs médicaux. Qui font peser sur le personnel de santé une charge de travail insupportable….

 Bref, qui ont transformé la santé en marchandise en lui appliquant les lois du marché ! Au fond, qui poussent à l’abaissement de l’hôpital public pour la population. Tandis que les riches sont traités dans des cliniques privées.

 

Le minuscule coronavirus sera-t-il le grain de sable qui va enrayer
la course folle de la mondialisation ?

 Il est encore trop tôt pour le dire, mais nous pouvons sérieusement l’envisager.

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Sur la mondialisation libérale, La Tropicalisation du Monde de Xavier Ricard Lanata  ==> ICI

Voir aussi les travaux de Suzan George ==> ICI