Superprofits dans le luxe et inégalités. En ce début d’année 2023, Bernard Arnault a été déclaré « l’homme le plus riche du monde », en raison de la croissance des profits du groupe de luxe LVMH dont il est largement propriétaire.
Consommation de produits de luxe et inégalités
La prospérité des activités de luxe dans le monde est un des effets de la croissance régulière des inégalités. Le lien entre les deux phénomènes est clair. Les inégalités croissantes concentrent la croissance des revenus chez les plus riches. Avec ces revenus croissants, ceux-ci cherchent des dépenses de produits spécifiques qui vont les distinguer du reste des êtres humains. Ils les trouvent justement dans les produits de luxe !
Ainsi, la fortune croissante de Mr Arnault est le signe, le témoignage criant de cette distorsion croissante de la répartition de la richesse produite dans le monde.
Toujours plus d’inégalités
Janvier, c’est aussi le moment du Forum de Davos et de la publication par Oxfam de son rapport sur les inégalités mondiales [1]. Ce rapport est accablant : les inégalités continuent de croitre quelle que soit la situation dans le monde, ses difficultés, ses conflits. Ni le Covid 19, ni la guerre en Ukraine, ni les sécheresses et inondations, ni les tensions sur les céréales, ni la hausse des prix des produits de base et de l’énergie… ne ralentissent la croissance des richesses des plus riches. Bien au contraire.
Oxfam a intitulé opportunément son rapport 2023 : « La loi du plus riche ». Et c’est une invitation à nous interroger sur les mécanismes qui provoquent cette croissance des inégalités.
Mais d’où vient cette croissance des inégalités ?
On doit se poser la question, car la croissance des inégalités ne tombe pas du ciel !
Elle est le produit des « réformes » qui sont menées depuis plusieurs décennies dans toutes les sociétés du monde. Privatisations, réformes du droit du travail, dérégulation des systèmes bancaires, allègements de la fiscalité sur les revenus du capital et alourdissement sur les revenus du travail… Tandis que les services publics se détériorent continument, au Nord comme au Sud.
Et pendant ce temps, les grandes entreprises ont guichet ouvert sur les subventions de l’Etat. Et ce, sans contreparties en termes d’embauche par exemple. Les vrais assistés, ce sont elles !
« State capture », au Sud mais aussi au Nord
De fait, les plus riches ont le pouvoir de peser sur l’écriture des « réformes », via le travail des lobbies qu’ils financent, à Paris, Bruxelles, Washington, Tokyo et ailleurs… En complément, ils maitrisent suffisamment de médias pour envelopper ces réformes d’un brouillard pour les faire accepter dans la population.
La Banque mondiale a nommé ce phénomène « state capture » (capture de l’Etat par les intérêts privées) pensant qu’il était réservé aux pays du Sud. Mais c’est aussi le cas au Nord, où les mécanismes sont certes plus sophistiqués, mais aboutissent au même résultat.
La réforme des retraites en France n’échappe pas à ce mouvement
Derrière la fumée de la complexité des dispositifs sur les retraites, ce sont les personnes vulnérables, les travailleurs à forte pénibilité des activités, les femmes aux emplois en pointillé… qui en supporteraient le poids principal si elle est adoptée.
Surtout, cette réforme illustre aux yeux d’une large partie de la population en France, qu’il y a vraiment deux poids deux mesures. Et toujours dans le sens d’un avantage aux riches, aux puissants. Alors que la hausse du prix de l’énergie a fait exploser les profits des compagnies pétrolières. Comme, hier, le Covid 19 et les aides massives des Etats avaient fait exploser les profits des firmes pharmaceutiques. Que dire en ces temps de conflits armés sur les profits des entreprises d’armement, alors que les dépense dans ce secteurs explosent avec la guerre contre l’agression russe en Ukraine ?
On pourra lire un exposé plus détaillé des réformes menées depuis les années 1980 au Nord, mais aussi au Sud (avec les Plans d’Ajustement Structurel) dans l’article « Réformes et explosion des inégalités » voir ==> ICI
Mais nous savons que ces réformes ne sont pas irréversibles
Même si l’on sait que les dispositifs multilatéraux (et notamment européens) sont là pour rendre plus difficiles ces réversibilités, il n’y a aucune fatalité devant ces évolutions. Au Sud comme au Nord.
En France, on peut renationaliser la SNCF (de fait privatisée), les autoroutes, des banques… On peut supprimer les avantages qui légalisent l’évasion fiscale. Réorienter les fonds de l’Etat vers les services publics (école, santé) et des actions conséquentes sur l’environnement menacé. On peut introduire la démocratie participative pour gérer, au niveau des territoires, les « communs », dans une approche qui ne soit ni celle de l’Etat ni celle du marché…
Des perspectives pour une action politique ! Ici et ailleurs. Des perspectives qui viennent en complément avec celles que les urgences climatique nous imposent.
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[1] La loi du plus riche : les chiffres-clés du rapport d’Oxfam de janvier 2023 :
- Depuis 2020, deux tiers des richesses mondiales produites ont été captées par les 1% les plus riches.
- Les milliardaires ont gagné 2,7 milliards de dollars par jour depuis 2020 grâce à l’intervention publique face au coronavirus.
- Depuis 2020, les 10 premiers milliardaires ont gagné 189 milliards d’euros, l’équivalent de deux ans de factures de gaz, d’électricité et de carburant des Français·es.
- Taxer la fortune des milliardaires français à hauteur d’à peine 2% permettrait de financer le déficit attendu des retraites.
- Avec une fortune de 179 milliards d’euros, Bernard Arnault est désormais l’homme le plus riche de la planète. Sa fortune correspond à l’équivalent de celle de près de 20 millions de Français·es.
Pour accéder au rapport en entier, voir ==> ICI
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