« Un moment à Pékin (2) » – de LIN Yutang – 2 Le triomphe de la vie. Cette seconde partie du roman fleuve commence avec la révolution chinoise de 1911 qui achève de mettre à bas l’Empire [1]. La République est instituée dans une grande confusion. On ne sort pas facilement de plusieurs siècles de pouvoir impérial absolu !
LIN Yutang reste pour l’essentiel dans le domaine intime. Il continue de nous faire partager la vie de deux familles riches et puissantes, les YAO et les TSENG. Les enfants que nous avons suivi dans la partie 1 (Enfances chinoises) se sont mariés. Ils ont eux-mêmes des enfants. La famille traditionnelle et son effritement sont au cœur des pages de cette partie du récit. Les idées modernes s’infiltrent par les jeunes générations. Elles bouleversent l’organisation familiale séculaire des familles. Les alliances par les mariages sont les principaux vecteurs de ces profonds changements.
Cependant, il n’est pas possible de s’isoler du monde qui craque de toutes parts autour des familles. La révolution nationaliste chinoise entre avec fracas dans le récit. Les jeunes se mobilisent avec les étudiants contre le gouvernement complice des Japonais et autres étrangers pour piller et contrôler le pays. Les jeunes veulent recouvrer la pleine souveraineté de la Chine. Ils payent le prix du sang pour cette audace. Moulane, une des principales héroïnes du récit, perd sa fille ainée Amane dans la répression contre la jeunesse. Sur la fin du roman, c’est la guerre contre l’invasion japonaise qui s’impose d’une façon dramatique dans la vie de nos personnages.
Avec beaucoup de subtilité et de délicatesse, LIN Yutang nous fait partager la découverte hésitante de la liberté, l’ouverture inquiète et curieuse au monde nouveau qui affleure dans la confusion. Comme partout ailleurs sur la planète, se joue l’émergence de l’individu. Dès cette époque, dans la Chine qui amorce un siècle de mutations profondes et douloureuses.
De très belles pages nous font découvrir la nature et l’amour des personnages pour la nature. Mais aussi pour la langue chinoise, son écriture, et l’usage immodéré de la nomination des gens et des choses. Des pages émouvantes sur les horreurs de la guerre, de la fuite en masse des combats, dans la confusion, la peur, le chaos et la violence.
En toile de fond, l’effondrement d’un empire
La dynastie mandchoue s’écroule en 2011. Les élites perdent leurs privilèges, mais le bouleversement s’effectue dans la confusion. L’empereur, sa famille, ses concubines, ses eunuques et ses servantes continuent un temps d’habiter dans la Cité Interdite. Mais sans pouvoirs. Les puissants cachent leur fortune et intriguent pour reprendre des positions dans l’Etat qui se reconstruit dans le chaos. C’est encore par sa position dans l’Etat que l’on acquiert la richesse. Celle-ci s’ajoutait au prestige et à la puissance dans l’ancien système des mandarins.
Le système des mandarins
Il faut prendre la mesure de la profondeur du bouleversement en cours. Le système mandarinal, qui avait assuré à l’empire une administration puissante et efficace, existait depuis plus de 13 siècles. Le recrutement des mandarins, à divers niveaux dans la hiérarchie et dans le maillage du territoire, était basé sur la compétence intellectuelle ET morale, à partir d’examens sévères [2]. La corruption de ce système a été pour beaucoup dans l’affaiblissement du pouvoir impérial puis dans sa chute au début du XX° siècle.
TSENG le patriarche, est un de ces hauts mandarins
TSENG est le patriarche d’une des familles que nous allons accompagner tout au long du récit de ce long roman. C’est un mandarin. Et c’est ce qui assure à la famille richesse et puissance. L’âge va l’écarter des turbulences de l’époque, et il va conserver sa richesse. Ainsi que son immense maison dans laquelle la famille élargie (et les servantes) perpétue les traditions, avant que les enfant ne se dispersent. Il conserve des idées traditionnelles, hostiles aux influences étrangères. Il déplore la venue « d’une époque sans roi, sans père et sans maitre » (p 753). Et dénonce un monde dominé par les deux plus grands fléaux que sont « l’avidité commerciale et le militarisme insolent » (p 755).
Mais son opposition faiblit quand il finit par accepter de faire soigner son diabète (la « maladie aux urines sucrées ») par l’insuline. Un médicament qui n’a pas de nom dans la langue chinoise !
Les TSENG se sont alliés aux YAO, autre famille puissante
Une famille dont la richesse a été construite sur le commerce du thé et des « simples » (plantes médicinales). C’est par le mariage de la fille YAO Moulane avec le fils TSENG Sunya que s’est fondée cette alliance. Sunya ne peut plus accéder à un poste de fonctionnaire après la chute de l’Empire. Il reste oisif pendant les premières années de son mariage.
Le père YAO ne travaille pas non plus. Il collectionne les antiquités chinoises, notamment des os gravés qui portent les plus anciennes écritures connues de la langue chinoise. Il a confié au frère de son épouse la conduite de ses affaires. Celles-ci prospèrent et laissent d’amples revenus à la famille élargie. Mais aussi des maisons immenses où celle-ci se déploie avec ses serviteurs.
YAO Moulane a repris des idées modernes de son père
C’est elle qui a coupé la natte de son mari, comme un geste de défi au pouvoir mandchou en déclin. Elle est allée à l’école avec sa sœur Mocho. Mais son comportement n’est pas exempt de contradictions. Après quelques années de mariage, Moulane poussera son mari à prendre une concubine.
Indépendante, énergique, aimante, Moulane prend peu à peu la direction de la maison TSENG où elle vit avec son mari. Ce sont les femmes qui dirigent la maisonnée, avec les fils et leurs femmes, leurs enfants, et les servantes. La mère TSENG est tout heureuse de laisser Moulane prendre la direction de la maison. Elle a toujours eu le soucis de l’avenir. En arrangeant avec soin les mariages de ses enfants. En pensant à la bonne tenue de la Maison… ainsi qu’à la réputation de la famille.
Les craquements de la société
Les comportements de prédation qui prévalaient à la fin de l’Empire ne disparaissent pas avec la Révolution. Loin de là. NIOU, appelé « le Dieu des Richesses » tant sa prédation de l’argent public était immense, a donné sa fille Souyoun à un des fils TSENG Chinya. Le frère ainé, NIOU Houaiyou, grand amateur de femmes, s’est épris d’une fille de famille qu’il pourchasse jusque dans un monastère d’où il l’enlève. C’est un immense sacrilège. Houaiyou pense que son nom, redouté, va lui assurer l’impunité. Mais la Révolution a desserré les contraintes. On assiste à un rejet de cette provocation dans la société pékinoise. Et le fils est lourdement condamné. Lifou, qui a dénoncé Houaiyou dans un pamphlet, s’attire la haine du jeune voyou qui saura se venger.
La jeune sœur, NIOU Sounyou, entrée dans la famille TSENG, va contribuer à disloquer l’ordre familial. Ses fréquentations, ses sorties, son cynisme, et ses gigantesques pertes au jeu… heurtent profondément le père TSENG. Tandis que le fils Chinya plie devant sa femme autoritaire et manipulatrice.
Les bouleversements vestimentaires envahissent la société
Les hommes se coupent la natte et abandonnent leurs grandes « robes » pour ces « horribles pantalons ». C’est bien pour cela que les occidentaux, toujours affairés, « marchent vite et d’une façon si peu digne avec cet accoutrement » ! Tandis que les robes des Chinois assuraient aux hommes un déplacement « lent et majestueux ». (p 573)
De même la poignée de main en forme de salut est considérée comme un geste incompréhensible et grossier.
Dans « Un moment à Pékin (2) » – LIN Yutang nous montre l’importance dans la haute société chinoise du langage, de la nomination des gens et des lieux, de l’écriture
Nous n’avons, dans notre lecture du roman, qu’une évocation indirecte de cet intérêt pour la langue chinoise puisque nous lisons le roman en français. Dans une traduction venant de l’anglais car l’ouvrage a été écrit dans cette langue.
Mais on sent l’importance que l’auteur accorde au thème du langage. Il prête à ses personnages une extrême attention à la langue dans son rapport singulier avec l’écriture. Par exemple, dans les jeux entre signifiant (le sens du mot) et signifié (les caractères de l’écriture et le son du mot qui sont dissociés en Chinois).
Dans le choix des prénoms pour les enfants (p 598). Dans la façon de nommer les pavillons dans les maisons, ou ses portes donnant sur l’extérieur. Mais aussi dans les subtilités de l’écriture, qui dévoile, par ses formes, la psychologie de leur auteur. Avec un recours fréquent aux références puisées aux sources de la littérature chinoise, forte de sa profondeur historique de plusieurs millénaires. Ainsi, les auteurs anciens sont souvent évoqués. La poésie est aussi très présente. Elle se manifeste dans les citations qui égrènent la vie quotidienne. Mais aussi dans les « concours de distique » (p 651) [3].
Le père YOA a la tentation d’anéantir sa fortune
L’autre patriarche du roman, YOA, est tout à son désespoir d’avoir perdu Tijen son fils ainé. D’abord dans la passion que ce fils instable a entretenu pour sa servante Ecran d’Argent, dont est issue Poya, un garçon que la famille va reprendre. Puis par son accident de cheval qui lui sera fatal. Voir la première partie de ce roman « Jeunesses chinoises » ==> ICI
Le père YOA, taoïste convaincu, a la tentation de léguer toute sa fortune à un monastère. Les enfants restent silencieux devant cette perspective. Mais Moulane n’est pas choquée. Elle rêve d’une vie modeste, avec son époux et ses enfants. Dans une maison qui ne sera pas ce que les maisons de maitre avaient de lourd, de majestueux, d’encombrant.
« Les Jardins du Prince »
Mais pour le moment, c’est une tout autre direction que prend la famille YAO. Le père a décidé d’acheter un palais à un prince mandchou déchu, dans un immense parc au Nord de Pékin, que l’on appelle « Les Jardins du Prince ». Un ensemble majestueux : des bâtiments somptueux dispersés dans un jardin magnifique.
Pour célébrer cette acquisition, la famille YAO organise une grande fête. Les anciens regardent avec bienveillance les jeunes s’ébattent dans les jardins. Avec intrigues amoureuses, amitiés et jalousies, enthousiasmes romantiques et joutes de poésie.
Les capacités réflexives
L’auteur prête à ses personnages, notamment les jeunes femmes dont il décrit les pensées et les comportements avec une grande finesse, d’importantes capacités de réflexion sur eux-mêmes. Notamment quand ils découvrent le sentiment de l’amour sans avoir les « mots pour le dire ». (Cf la partie 1 de l’ouvrage)
On trouve une trace explicite de cette capacité réflexive dans les noms donnés à deux pavillons dans la nouvelle maison que la famille YAO vient d’acheter. Ces pavillons portent les noms de « Pour y remédier sur ses erreurs » et « Salle de l’Examen de soi-même » (p 646)
Et le vieux YAO choisi pour un de ses petits-fils un prénom par allusion à un vers de Tao Yuanming [4], un écrivain du V° siècle : « Je sais qu’aujourd’hui j’ai raison et qu’hier j’avais tort. » (p 598) [5]
La bureaucratie de l’Empire
Avec humour, LIN Yutang décrit le travail des fonctionnaires, qui passent leur temps à adresser à des supérieurs de courriers dont le contenu se réduit à l’évocation des différents services qui ont eu en main le courrier. Le travail consiste donc à gérer la cascade de mentions de la transmission du document à des personnes dont on évoque longuement titres et fonctions.
Une démarche qui finit par noyer totalement l’objet même de la note administrative. La forme écrase, étouffe le fond. Il n’en reste rien. (p 608)
L’amour de la nature
Les familles s’offrent une visite de la Montagne du Taïshan [6]. Lieu sacré du Taoïsme, cette montagne est réputée pour sa beauté, la richesse de sa végétation, et les immenses pierres qui jonchent ses flancs. Des pierres sur lesquelles les hommes ont gravé, depuis des siècles, des écritures. Il en est même une, remarquable, qui porte une « Inscription sans mots » à la gloire de l’empereur (tyrannique) Chin qui a unifié la Chine et construit les premiers segments de la Grande Muraille. Voir ==> ICI
Les promeneurs, accompagnés de leurs servantes, suivent, en chaise à porteur, le chemin dallé qui grimpe. Ils vont passer la nuit au sommet pour voir le lever du soleil au petit matin. LIN Yutang nous donne là un florilège de mots qui décrivent les impressions somptueuses que la nature nous offre à son éveil.
L’amour tout court
Moulane et Lifou, qui a épousé sa sœur Mocho, marchent ensemble sur le chemin du retour. Moulane a une immense admiration pour ce jeune homme d’extraction modeste. Lifou manifeste une liberté de pensée comme elle ne l’a jamais rencontrée. Même avec son père YAO pourtant ouvert aux idées modernes. Elle demeure secrètement amoureuse de lui. Et s’est résignée à épouser un fils TSENG, laissant à sa jeune sœur le brillant jeune homme.
Moulane sent, à l’écoute de ses émotions confuses, que continue de palpiter son amour pour lui. Elle reste cependant dans le respect des règles familiales, et notamment dans une affection et une loyauté à sa sœur, Mocho, femme de Lifou.
Des jeunes femmes belles, intelligentes, bienveillantes. Face aux fils de famille dolents et faibles
Avec Paofin qui signifie « Parfum rare », LIN Yutang fait entrer un nouveau personnage de jeune femme dans le récit. Belle, intelligente, brillante, elle intrigue la famille par le mystère de sa situation.
Paofin se présente comme servante et entre dans la maison YAO. Le père observe qu’il n’est pas insensible à sa beauté. Il est aussi inquiet sur l’équilibre familial que peut bouleverser une femme aussi éblouissante. Paofin a tout d’une fille de famille, mais prend une posture humble et accepte son statut de servante. Très vite, elle perturbe YAO Afeil, le dernier des garçons, pourtant promis à Jade rouge sa cousine.
Celle-ci est malade de tuberculose et va mourir dans un scénario romantique décrit avec une grande finesse par l’auteur. Dans la famille élargie, faits et gestes s’étalent aux yeux de tous. La grande maison des « Jardins », ses recoins, son parc, se prêtent à ces scènes. Seuls les véritables sentiments se cachent.
Les garçons sont les jouets des filles, dans ces jeux subtils où l’amour et la mort sont conviés. Face à eux, LIN Yutang ne met pas dans les comportements féminins des calculs hostiles. Mais l’intelligence humaine, la sensibilité, sont clairement du côté des femmes.
Condamnée par sa maladie, ayant perçu l’attirance d’Afei pour la belle Paofin, Jade rouge se jettera à l’eau dans un des étangs du Jardin. Les messages d’adieu qu’elle écrit sont autant de signes à déchiffrer. A-t-elle vraiment désigné sa rivale, Paofin, comme l’épouse qui rendra heureux Afeil, une fois qu’elle aura disparu ?
Seuls les vieux pères gardent une stature et une autorité dans ce remue-ménage. Mais ils sentent que le pouvoir leur échappe. Les règles ancestrales ne sont plus strictement appliquées. Notamment celles qui codifiaient les relations entre jeunes filles et jeunes garçons, au sein même de ces grandes familles.
La jeunesse étudiante et rebelle fait des « Jardins » un lieu de rencontres intellectuelles… et amoureuses
Dans la ville de Pékin, les filles YAO se font remarquer. Brillantes, belles, elles expriment avec brio l’éveil des individus dans le monde qui pointe sur les décombres de l’Empire. Moulane, Mocho, Paofin et Mannia la veuve vierge. De vieux philosophes, des peintres se mêlent à ces soirées créatives. Les débats s’enflamment. Pour ou contre la tradition du concubinage, très présente en Chine ? « Vous avez vu une théière avec quatre tasses. Mais avez-vous jamais vu une tasse avec quatre théières ? » déclare le vieux M. Kou, philosophe conservateur. (p 834)
L’honneur de la famille
Le nom de la famille TSENG est sali par le comportement de NIOU Souyoun qui a épousé TSENG Chinya, désormais fils ainé après la mort de Pingya. Sounyou a joué et perdu 10.000 dollars que son mari ne peut payer. Cette dette à payer provoque une crise dans la famille.
Le patrimoine est partagé entre les enfants. Le père paye la dette, mais publie une annonce dans la presse annonçant la séparation de son fils d’avec cette fille NIOU. Chinya va concrétiser cette séparation par le divorce. Mais la famille NIOU a été humiliée par cette annonce. Elle se vengera.
YAO père se retire en une retraite d’ascèse
Le vieux patriarche a marié ses enfants. YAO Chinya, divorcé de NIOU Souyoun, a épousé Senteur vague. Celle-ci, enfant volée quand elle avait 6 ans, a retrouvé ses parents. YAO Afei vient d’épouser Paofin. Le vœux de Jade rouge, où ce que l’on a compris des signes qu’elle a laissés, est exaucé. Afeil et Paofin gardent un immense respect pour cette cousine partie avec sa maladie mortelle dans les eaux du Jardin.
YAO père convoque ses enfants, leurs époux et épouse. Il leur déclare qu’il va se retirer dans un monastère dont il cache le lieu. Il reviendra dans dix ans, s’il est encore en vie. Mais il demande à sa famille de ne pas chercher à le retrouver.
Encore et encore, l’irruption de la modernité dans le champ politique
L’université de Pékin devient le théâtre des conflits où s’expriment les idées nouvelles qui fracturent la société chinoise, en ce début du XX° siècle. Un conflit, classique, entre Anciens et Modernes. Qui recouvre, de fait, les enjeux politiques des pouvoirs entre chefs de guerre qui se disputent la conduite de la Chine et surtout les immenses possibilités d’enrichissements que ces positions procurent.
Pour ou contre ?
Les membres des deux familles sont bien sûr aux prises avec les idées nouvelles. Ils débattent à l’infini. Pour ou contre les thèmes que la modernité soulève et qui divisent le monde intellectuel ?
Chacun, chacune, compose un cocktail de positions sur ces thèmes qui agitent la société. Pour ou contre l’adoption d’une langue chinoise moderne ? Les pieds bandés ? Le concubinage ? Pour ou contre la poésie en vers libres ? L’enseignement mixte ? Le culte des ancêtres ? Le port de la natte pour les hommes ? Confucius ? Pour ou contre le tennis ? L’amour libre ? Le remariage des veuves ? La restriction de la natalité ?
Ces batailles d’opinions se retrouvent dans des publications que les intellectuels et les étudiants produisent. Avec les risques élevés de répression car le pouvoir se sait menacé par ce bouillonnement fait à la fois d’idées et de gestes romanesques.
L’Histoire tourmentée de la Chine des années 1920 s’invite dans le récit
Dans le pays, le chaos s’installe. Les généraux se livrent entre eux à des batailles meurtrières. Les grands généraux font de grandes batailles. Les petits généraux de petites batailles. L’ensemble de la société est en proie à un grand désordre et insécurité.
Un enjeu de souveraineté, face aux puissances qui ont humilié le pays
La Chine conserve une unité territoriale de façade. Elle est découpée de fait entre puissances coloniales par ce que les Chinois appellent les « Traités inégaux » [7].
Le chaos qui s’est installé dans le pays voit s’opposer des seigneurs de guerre que les puissances étrangères soutiennent et manipulent à la fois [8]. Un véritable imbroglio où les alliances se font et se défont !
La jeunesse étudiante fait du recouvrement de la souveraineté du pays un puissant motif de mobilisation
En 1919, la Chine est présente aux discussions qui vont aboutir au Traité de Versailles. Elle a été alliée à la France et à la Grande Bretagne et a envoyé 100.000 hommes en Europe pour soutenir l’effort de guerre de ces pays dans le premier conflit mondial. Mais après la victoire, la France et la Grande Bretagne trahissent la Chine en passant un accord secret avec le Japon. La Chine quitte alors la Conférence de Versailles.
De son côté, le gouvernement chinois a lui aussi passé des accords avec le Japon, lui promettant la province de Chantoung en contrepartie d’un emprunt (p 894) [9]. Des accords tout aussi secrets. Il a lui, trahi son peuple. L’imbroglio se complique ainsi avec le double jeu du Japon, future puissance coloniale dans la région.
La vérité se dévoile. Des émeutes éclatent à Pékin, dénonçant cet abandon du Chantoung.
Le mouvement patriotique des étudiants réussi à chasser le gouvernement de la « Bande d’Anfou »
Une bande formée de politiciens incompétents et corrompus. Mais le gouvernement qui remplace la Bande d’Anfou ne vaut pas mieux. Il demeure paralysé par les affrontements entre les chefs de guerre qui détiennent une part du pouvoir réel. Derrière, les puissances étrangères tirent les ficelles de ce jeu mortifère. On retrouvera ces politiciens corrompus, collaborant avec les Japonais quand ceux-ci envahiront la Mandchourie en 1931 [10].
Les étudiants repartent à l’assaut du pouvoir qui leur tend un véritable guet-apens. La police, déchainée, tire sur les jeunes, laissant au sol des dizaines de morts. Garçons et filles. Parmi celles-ci, Amane, la fille ainée de Moulane, tuée d’une balle en pleine poitrine au milieu de ses amis étudiants avec qui elle militait depuis quelques semaines. Elle avait 17 ans.
Cette fois, la grande Histoire mord profondément les familles de notre récit, les YAO et les TSENG
Moulane est littéralement abattue. « Sa douleur était quelque chose de plus profond que les larmes. » (p 957). Elle en est transformée et se coupe de la société, des enjeux politiques du moment. Elle veut quitter Pékin et vivre avec son mari et ses enfants dans une maison isolée. Au bord d’un lac.
Les deux sœurs, Moulane et Mocho, pressent Lifou de rompre avec l’engagement politique
Lifou publie dans la presse des brulots contre le pouvoir corrompu des autorités. Le Général « Viande de chien » occupe Pékin et se donne pour tâche de chasser les communistes. On fusille sans jugement les intellectuels, des journalistes.
La police vient se saisir de Lifou, mais aussi de Chen San le secrétaire de Lifou, et de son épouse, sœur de Lifou. Il est accusé de « communisme ». Les familles TSENG et YAO mobilisent alors tous leurs appuis dans Pékin pour sauver Lifou, Chen San et son épouse.
Suivent des pages du récit d’une intense émotion. Il y a d’abord le jugement des trois personnes, soupçonnées de communisme. Le juge et Lifou engagent une discussion où les références à la littérature classique sont mises sur la table. Lifou tient des positions originales. En tant que chercheur en biologie, il attribue une sensibilité aux plantes. Il réduit ainsi la distance qui sépare l’être humain des autres composantes de la nature [11]. Le juge attribue ces positions étranges à un penchant pour le communisme. Mais il agit surtout en promesse à la famille NIOU qui trouve là le terrain de sa vengeance contre la famille TSENG.
La condamnation de Lifou est légère, tandis que Chen San et sa femme sont libérés. Mais le chaos qui règne à Pékin ne préjuge de rien. Lifou peut être exécuté d’un moment à l’autre par un renversement d’alliance au sommet de l’Etat.
Moulane est bouleversée
Son amour pour Lifou est irrépressible, et elle va entamer une démarche d’une immense audace. Sans consulter ni son mari ni sa sœur, contre toutes les conventions familiales, elle va nuitamment rencontrer Lifou dans sa cellule. Elle devra donner au gardien deux perles d’une grande valeur pour obtenir cette faveur.
Puis, sur une impulsion, elle demande à voir le commandant militaire pour plaider la libération de Lifou. C’est un gigantesque coup de poker. Elle s’est ainsi livrée au commandant. Va-t-il exiger d’elle de se donner à lui ? Habilement, Moulane réussi à mobiliser l’honneur du militaire et obtient le document libérant Lifou.
Dans « Un moment à Pékin », LIN Yutang développe abondamment le thème des relations entre servantes et fils de famille
Les garçons de la famille finissent à plusieurs reprises par épouser les servantes de la maison. La mère YAO s’oppose en vain à l’union de son fils ainé, Tijen, avec Ecran d’Argent. Et cela se terminera par un drame (voir Partie 1 : « Enfances chinoises » ==> ICI). Mais les autres unions sont nouées avec l’accord des parents.
Plus généralement, l’auteur met en scène et valorise les mariages qui s’affranchissent des conventions de classe. Lifou est d’une famille modeste. Entré par son mariage avec YAO Mocho dans une famille riche et puissante, il va lui-même précipiter celui de sa sœur avec Chen San son secrétaire, fils d’une ancienne servante de la maison. Cela lui sera reproché par le juge qui va l’interroger et le soupçonne pour cet acte « communiste ».
Durement affectée, la famille commence à se disperser
C’est Moulane qui est la plus atteinte par la nouvelles situation. Elle a perdu sa fille Amane. Et elle a fait un geste fou. Celui de mettre en danger son honneur pour sauver Lifou, sans consulter ni son mari, ni la femme de Lifou qui est aussi sa sœur. Par-delà les traditions et les mariages arrangés, le fil de l’amour continue secrètement de courir dans l’histoire. Et c’est Moulane qui porte au plus haut ce sentiment.
Elle veut toujours quitter Pékin, la grande maison familiale. Partir dans le Sud. Mais la mère de son mari, la vieille TSENG, est malade, et on ne peut l’abandonner ainsi. C’est manquer au devoir filial qui subsiste fortement dans la famille. Et plus généralement, dans le pays.
Une partie des enfants a déjà quitté la maison. La fidèle concubine du père TSENG, Cassie, voit ses deux filles épouser des médecins qui ont étudié en Angleterre et pratiquent donc la médecine occidentale. Ces filles habitent dans des appartements, en couples modernes.
Le retour du moine, le père YAO
Dix ans se sont passées depuis que le père YAO s’est retiré dans un monastère. Il revient un soir. Ses cheveux, sa barbe ont blanchi. Sa peau s’est burinée sous les marches au soleil. Il a vécu une vie d’ascète, allant à pied de monastère en monastère. Moulane et sa sœur Mocho sont tellement heureuses de retrouver leur père !
Moulane part vivre dans le Sud
La mère TSENG est morte. Et son père YOA pourra venir vivre avec eux. Elle achète une maison à Hangtchéou, au bord d’un lac. A 4 heures de train au Sud-Ouest de Changhai. Elle construit une vie comme elle en rêvait, simple et rustique. Elle s’habille comme une paysanne, abandonnant la soie pour le coton. Moulane n’amène avec elle que deux domestique, Brocart et son mari, ainsi que leur fils Petit Pâté.
Elle est séduite par la vie plus douce de cette région, loin de l’agitation et des luttes politiques de Pékin qui ont été fatales à sa fille Amane. La cuisine aussi l’enchante, et elle se délecte des mets nouveaux que la riche campagne environnante et les traditions culinaires locales offrent.
Cuire un poulet non plumé
Je ne puis résister à reproduire ici une recette originale. « Le poulet à la façon des mendiants » (p 1100) : « [Moulane] apportait à un pique-nique un poulet entier, vidé mais non plumé. Le poulet était barbouillé d’argile, de façon à en recevoir une bonne couche. Et ensuite, rôtit dans un feu à ciel ouvert, comme on rôtit des pommes de terre. Au bout de vingt à trente minutes, selon la grosseur de la bête, le poulet était retiré du feu et dépouillé de la couche de terre à quoi adhérait les plumes. Il ne restait plus alors qu’un poulet fumant, délicat et tendre, dont pas une goutte de jus n’était perdue. Ses invités arrachaient avec leurs doigts les ailes, les pilons et les blancs, qu’ils mangeaient après les avoir trempés dans de la sauce de soja… »
Mais cette vie trop tranquille lasse son mari Sunya
Celui-ci rencontre une jeune étudiante aux Beaux-Arts de la ville. Le mariage de Moulane est en danger. Celle-ci, avec les conseils de son vieux père YAO, affronte la jeune femme et noue avec elle une alliance contre Sunya qui renonce à cette relation.
De son côté, Moulane abandonne son fantasme de paysanne et reprend ses habits de soie. Elle emmène son mari au théâtre et s’occupe d’elle et de lui.
La Chine est de plus en plus dépecée
Le Japon a envahi la Mandchourie en 1931. La guerre sino-japonaise éclatera en 1937. Entre ces dates, la crise s’approfondit. Le Japon impose des échanges commerciaux qui sont, du point de vue chinois, illégaux. C’est donc de la contrebande. Mais les autorités chinoises ne peuvent véritablement réprimer ces trafics car le Japon veille à défendre ses nationaux qui s’y livrent.
Mais ce ne sont pas seulement des marchandises de contrebande qui circulent en masse dans le pays. Ce sont aussi des drogues : opium, cocaïne avec l’appui des autorités japonaises. La Chine devient le centre mondial de la drogue, à tous les stades du processus : production agricole, transformation dans des laboratoires clandestins, commerce local et international.
Les hommes des familles YAO et TSENG s’investissent pour défendre leur pays
Non pas en luttant dans la rue, mais en travaillant au sein des organes publics qui tentent de limiter ces échanges illégaux et mortifères. Ils sont aux prises avec les contrebandiers japonais et coréens qui jouissent de leur extraterritorialité pour mener à grande échelle leurs trafics. Lifou, de son coté, a rejoint une unité publique qui lutte contre la corruption.
Les femmes YAO et TSENG craignent pour la vie des hommes de la famille qui se sont investis dans ces luttes inégales. L’Etat chinois est de plus en plus impuissant. Mannia en vient à penser que la guerre entre la Chine et le Japon aura le mérite de mettre face à face deux armées. Cette guerre ferait cesser cette situation d’humiliation avec le « pays ami » qui bride, de l’intérieur, les capacités chinoises au nom de « L’ordre nouveau en Asie » que le Japon impérial veut étendre sur l’Est du continent.
Le vieux père YAO meurt
(p 1139) « Une nuit, M. YAO mourut dans son sommeil. Ce fut une mort toute simple et toute naturelle. Un déclin graduel de sa vitalité corporelle. Il perdit peu à peu l’appétit, jusqu’à ce qu’il ne pût plus prendre de bouille de riz. Il cessa même de boire de l’eau. Longtemps après qu’il parut mort, son pouls battait encore faiblement, et ses yeux refusaient de se fermer. Ce fut vraiment une mort taoïste. »
La guerre est (enfin) déclarée entre la Chine et le Japon en 1937
Cette déclaration de guerre met fin à l’humiliation des autorités chinoises par les soldats, les policiers, les contrebandiers japonais qui mutilaient leurs capacités d’action et sapaient leur autorité. Aux côtés des trafiquants en tous genres, régnaient en maître espions, collaborateurs des Japonais, traitres, acrobates du double jeu, agents étrangers, manipulateurs… Les assassinats se multiplient, commis par des organisations secrètes de résistance qui se forment dans la société chinoise. Tandis que le Japon, fort de sa base en Mandchourie occupée, transfère des dizaines de milliers de soldats sur le continent chinois.
Une haine antijaponaise contre les « démons nains » se développe au sein de toutes les couches de la population, nourrissant un sentiment national de recouvrement de son identité, sa souveraineté.
La déclaration de guerre rompt brusquement avec ce gigantesque mensonge. LIN Yutang nous montre comment une guerre peut être à ce point désirée. Non pas pour un motif d’agression. Mais pour remettre la vérité sur ses pieds. Et défendre son pays : « Plutôt la guerre que l’esclavage ».
Fierté nationale
LIN Yutang adopte, en cette fin du récit, un ton de fierté nationale qui rompt avec le cours du récit. Au travers des personnages de son récit, il dénonce les violences perpétrées par l’armée japonaise. Avec une emphase mesurée, il montre comment les héros du roman prennent conscience de l’importance de défendre la Chine face aux agressions étrangères. Et surtout, à celles que le Japon mène et va mener à partir d e1937 quand la guerre est ouvertement déclarée.
Déferlement de violence par les soldats japonais
Ainsi, l’auteur nous fait partager un moment douloureux dans la vie des héros qui ont peuplé le roman, tout au long de ses 1250 pages. Pékin est au bord de sa prise par l’armée japonaise.
Alors qu’ils s’étaient réfugiés dans un village de montagne au Nord de Pékin, Assouane, fils de Mannia, retrouve sa mère, son épouse et son fils bébé sauvagement tués et mutilés par les hordes de soldats qui déferlent sur le pays. Mannia, la veuve vierge, a conservé son honneur. Elle s’est pendue avant d’être prise. Mais son corps mort a été outragé. Assouane voit tout cela. Sa détermination à s’engager dans l’armée chinoise en sort décuplée.
Dans le sud du pays, près de Shanghai, la bataille de Nankin, capitale alors de la Chine, concentre toute l’énergie des deux armées. Elle se soldera par une défaite des troupes chinoises [12].
Les fils veulent s’engager dans la guerre
Atoung, fils de Moulane, veut partir sur le front. Sa mère tente, en vain, de s’y opposer. Elle a déjà perdu sa fille ainée, Amane, et Atoung et son unique garçon. Néanmoins, le jeune homme partira, et servira dans les transmissions radio.
La guerre !
LIN Yutang nous fait partager, en des pages d’une grande force, un moment sur le front, près de Nankin. Sinya accompagne son neveu qui va rejoindre les combats et se retrouvera aux côtés d’Atoung, son cousin. C’est la nuit, l’obscurité est trouée seulement par les lueurs et le bruit des bombardements tout proches. Les sons feutrés des soldats qui montent au front dans le silence de la nuit. La violence de la guerre est là, à quelques mètres…
Alors qu’ils rentrent en train de Shanghai, Moulane et sa famille sont pris dans un bombardement qui laisse sans vie des centaines d’hommes et de femmes. Un terrible déchainement de violence. On pense ici à des scènes de bombardement au Vietnam pendant la guerre de libération, dramatiquement décrites par Bao Ninh « Le chagrin de la guerre » voir ==> ICI
La situation est mauvaise pour les troupes chinoises qui seront battues sévèrement dans cette bataille.
Les réfugiés
Moulane, son mari et sa fille, décident de partir vers l’Ouest. Les combats se rapprochent. En un lyrisme tout à fait inattendu dans la lecture de ce long récit, l’émotion nationale s’empare des personnages. Moulane se fond dans l’immense cohorte de chinois qui fuient les combats en un mouvement qui déplace des millions de personnes. Elle retrouve confiance en elle, en la vie, dans ce mouvement de fusion avec le peuple chinois, son peuple.
Tandis qu’ils cheminent à pied sur la route en un immense ruban humain, ils croisent des camions de soldats qui montent au front. Sous les applaudissements des réfugiés, les soldats chantent : « Nous ne reviendrons pas / Avant que nos montagnes et nos fleuves nous aient été rendus ! »
La guerre sino-japonaise (1937-1945) fera environ 18 millions de victimes du côté chinois.
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Lin Yutang (林語堂), (1895 – 1976), est un écrivain et inventeur chinois, dont la traduction de classiques chinois en anglais a aidé à leur diffusion en Occident. « Un moment à Pékin », écrit en 1939, est un de ses romans les plus connu. Pour en savoir plus, voir ==> ICI
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[1] La révolution chinoise de 1911 ou révolution Xinhai (chinois traditionnel : 辛亥革命) est une période de bouleversements sociaux et politiques de grande envergure en Chine qui aboutit au renversement de la dynastie des Qing après 268 ans de règne (1644-1912). Le régime impérial qui gouvernait la Chine depuis des millénaires disparaît, laissant place à la république de Chine. D’après Wikipédia.
[2] En Chine impériale, l’examen impérial (科舉) avait pour but de sélectionner les fonctionnaires de l’État, à tous les échelons. Ce système a existé continûment pendant 1 300 ans, depuis sa création en 605 jusqu’à son abolition vers la fin de la dynastie Qing, en 1905. Les examens mandarinaux, dans la Chine impériale, permettaient d’entrer dans la bureaucratie de l’État, le premier but étant de remplacer la transmission du pouvoir aristocratique par une transmission du pouvoir méritocratique. Le système des examens mandarinaux fut institutionnalisé en 605, mais l’origine de ce système remonte à la dynastie des Han (206 av. J.-C. à 220). D’après Wikipedia. Pour en savoir plus, voir ==> ICI
Sur ce sujet, on lira aussi la note de lecture des Mémoires d’un eunuque dans la Cité Interdite de DAN Shi ==> ICI
[3] En poésie, un couplet, ou distique, est la réunion de deux vers, ou le fragment d’une œuvre, formant un ensemble complet par le sens, par exemple une maxime (Wikipédia). Par exemple :
Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux formes ont tout à l’heure passé.
Extrait des Fêtes galantes de Paul Verlaine.
[4] Tao Yuanming, ou Tao Qian, né en 365, mort en 427, est un écrivain chinois. Il est considéré comme un des plus grands poètes inspirés par le taoïsme. Il chante dans ses poèmes la retraite à la campagne et le vin. Wikipédia
[5] Cet indice constitue une réplique de l’assertion de Cornelius Castoriadis qui fait de la Grèce antique et de l’Europe occidentales les seules lieux où s’est élaborée une pensée réflexive. Voir sur ce point les notes de lecture sur ce penseur ==> ICI
[6] Le mont Tai ou Taishan (泰山), se situe au nord de la ville de Tai’an, dans la province du Shandong en République populaire de Chine. Le pic de l’Empereur de jade, point culminant a une altitude de 1545 m. Important par son histoire et sa signification culturelle, c’est l’une des cinq montagnes sacrées de la Chine. C’est le Mont de l’Est, associé à l’aurore, à la naissance et au renouveau, et la plus vénérée des cinq montagnes sacrées. Les temples qui y sont perchés sont une destination de choix pour les pèlerins depuis 3 000 ans (d’après Wikipédia).
[7] Les traités inégaux, comme les nomment les Chinois, Japonais et Coréens (不平等条约), sont un ensemble de traités datant du XIX° siècle, imposés à la Chine, à la Corée, et au Japon de la fin de l’époque d’Edo par les puissances colonisatrices de la région (Royaume-Uni, France, Pays-Bas, Allemagne, Russie, États-Unis, Autriche-Hongrie, Portugal, Japon de l’ère Meiji)1. D’autres pays et territoires sont l’objet de tels traités, tels l’Inde, le Népal, le Siam, le Tibet, le Viêt Nam ou Ceylan.
Il n’y a pas d’accord sur le nombre de traités de type « inégal » signés par la Chine et les pays étrangers (entre 500 et 1000). Signés à l’issue de défaites militaires, beaucoup de leurs clauses sont unilatérales, et visent à imposer à la Chine une « ouverture » qu’elle refusait.
Les différents points de ces traités sont essentiels pour comprendre le qualificatif d’« inégaux » :
- des enclaves territoriales sont concédées aux puissances étrangères, pour y établir leurs comptoirs, sous leurs propres législations ;
- la puissance étrangère importe et exporte librement en Chine ;
- un droit de séjour de missionnaire en Chine est instauré ;
- obtention de services consulaires compétents.
(Wikipédia). Pour en savoir plus, voir ==>ICI
[8] Les Anglo-Saxons soutiennent Wu Peifu et sa clique. Les Anglais sont avant tout soucieux de préserver leur influence et leur commerce dans la vallée du Yangzi. Les Américains misent également sur Wu Peifu, car ils voient en lui l’ennemi de l’influence Japonaise en Chine, dont ils redoutent la mainmise sur le pays. Français, Japonais et Allemands ne ménagent pas leur aide à Zhang Zuolin, maître de la Mandchourie, contre les Soviétiques qui manifestent aussi leurs ambitions dans cette partie septentrionale de la Chine. Mais les frontières ne sont pas figées entre les différents groupes des warlords. Peu à peu, elles se modifient avec la montée en puissance de l’aile gauche du Guomindang, soutenue par les Soviétiques. À travers ces luttes intestines entre seigneurs de la guerre, s’ébauche un affrontement indirect entre Occidentaux alliés au Japon, et Soviétiques, jusqu’à ce que Chiang Kai-shek prenne le pouvoir et achève la réunification de la Chine. Un autre danger apparaît alors, le Japon, bien décidé à mettre la main sur la Chine et l’Indochine, et à s’imposer dans tout le Pacifique. (La France et la Chine de Sun Yat-Sen à Mao Zedong, 1918-1953 – Nicole Bensacq- Ed. Tixier)
[9] Chantoung, ancienne transcription du nom de la province chinoise du Shandong.
[10] L’invasion japonaise de la Mandchourie commence en septembre 1931. La Mandchourie est envahie par l’Armée japonaise du Guandong. Les Japonais y forment, en février 1932, un État fantoche, appelé Mandchoukouo, qui leur est entièrement assujetti et qui perdure jusqu’en août 1945. D’après Wikipédia. Pour en savoir plus, voir ==> ICI
[11] Des positions que ne renierait pas Philippe Descola, anthropologue français.
[12] La Bataille de Nankin opposa en 1937 l’Armée impériale japonaise à l’Armée nationale révolutionnaire chinoise. Elle vit une victoire écrasante des troupes japonaises. Elle eut pour conséquence immédiate le massacre de Nankin.
La bataille de Shanghai incita les Japonais à retarder l’assaut sur Nankin, alors capitale de la Chine. La chute de Shanghai, à la fin novembre, fit comprendre à Tchang Kaï-Chek que la capitale serait la prochaine ville à tomber. Les Japonais commencèrent leur marche sur Nankin. Tchang Kaï-Chek ordonna le départ du gouvernement pour Wuhan. Les civils chinois commencèrent à fuir. Malgré la difficulté de la tâche, il fut décidé de défendre tout de même Nankin contre les Japonais. Le 13 décembre 1937, la ville tomba en leurs mains. Le massacre de Nankin, qui s’ensuivit, occupe une place importante parmi les crimes de guerre japonais.
Nankin devint ensuite le siège d’un gouvernement collaborateur mis en place par les Japonais (d’après Wikipédia).