« Sur l’amour et la mort » de Patrick SÜSKIND. Dans ce court essai, l’auteur nous entraine dans une divagation légère et érudite sur ces deux pôles majeurs de nos existences humaines. De nombreuses références dans l’histoire de la pensée ponctuent l’œuvre. Jésus est présent dans le texte. Il est mis en miroir (déformant) avec Orphée dans la tentative de celui-ci de ramener de l’enfer Eurydice, la femme qui concentre tout son amour. Thanatos et Eros sont là, à l’œuvre.

Un essai écrit par l’auteur du roman célèbre « Le Parfum : histoire d’un meurtrier ». Un roman qui m’avait enchanté quand j’ai découvert cet auteur il y a bien longtemps. Je n’ai cependant gardé en mémoire que cette belle appréciation, sans plus de détails.

Une divagation littéraire et philosophique

Patrick Süskind nous offre ici une divagation distante où le cynisme affleure. Fort heureusement, le texte est ponctué de savantes références aux grands textes littéraires et philosophiques.

Ce qui nous fait voyager avec plaisir dans les siècles. Et revisiter (superficiellement) des textes fondateurs de la littérature et de la philosophie. Platon, Socrate, Goethe, Virgile et Ovide, la Bible, Saint Augustin, Thomas Mann, Kleist, Wagner … sont convoqués pour soutenir les propos de l’auteur.

Amour et niaiserie

Les manifestations de l’amour sont traités avec humour et légèrement ridiculisées. L’amour rend aveugle, on le sait. Mais il nous rend aussi un peu niais. Et nous aurions à rougir, selon l’auteur, de la fadaise des lettre d’amour que nous avons écrites dans nos élans amoureux de nos jeunes années. Les trois exemples de comportements amoureux qu’il nous donne sont en effet bien ridicules. Patrick Süskind se garde bien, cependant, de nous faire part de sa propre expérience en la matière.

« Sur l’amour et la mort » de Patrick SÜSKIND - couverture du livre
Sur la couverture, un image tirée d’une peinture de Johann Fuessli « Le cauchemar »

De l’amour à la mort

L’auteur nous entraine dans les grands élans romantiques qui associent Eros et Thanatos. L’amour peut-il conduire à la mort ? Au meurtre même de l’objet aimé ? Au suicide ? Les poètes se sont emparé de ce thème pour exalter par le drame le sentiment d’amour. Le sentiment ou son expression.

Jésus et Orphée

Süskind nous propose une mise en miroir audacieuse. D’un côté, Jésus va tirer de la mort en le ressuscitant le pauvre Lazare déjà mis en tombeau. Il le fait en un geste qui soutient son ambition de sauver l’ensemble du genre humain. De l’autre, Orphée, seul, ose aller chercher Eurydice, la femme aimée tombée dans les abymes de l’enfer. Une démarche dictée par l’amour, à l’échelle d’un homme et d’une femme. Avec ses dons musicaux et sa grâce, Orphée enchante les gardiens de ces sinistres lieux. Tous tombent sous son charme : Eurydice est autorisée à quitter l’enfer et à retourner vivre avec les humains.

Elle va suivre Orphée qui remonte avec elle à la surface de la terre… Mais à une condition : qu’Orphée ne se retourne pas sur ce chemin périlleux. Tandis qu’Orphée chante sa joie d’avoir retrouvé Eurydice, un doute l’envahit. N’était-ce pas un piège des gardien des enfers ? Est-elle bien là, à le suivre ? La tentation est trop forte. Il se retourne, elle est bien là. Mais elle disparait aussi tôt, emportée vers les sombres ténèbres de l’enfer. L’humour est, là aussi, présent dans cette version singulière d’Orphée comparée à l’acte de Jésus.

Ce court essai de Süskind, publié en langue allemande en 2006, me semble emblématique de la post-modernité.

Sur la post-modernité voir  l’histoire des deux vaches post-modernes ==> ICI

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Patrick Süskind est un écrivain et dramaturge allemand. Né en 1949 en Bavière près de Munich, il étudie l’histoire et la littérature à Munich et à Aix-en-Provence. Il travaille ensuite comme scénariste pour la télévision.

Il écrit une pièce de théâtre à un personnage : La Contrebasse, qui sera jouée pour la première fois à Munich en 1981. Depuis sa création, cette pièce est régulièrement jouée en Allemagne et a également été interprétée à Paris par Jacques Villeret dans le rôle-titre.

Le Parfum est son premier roman édité en 1985 à Zurich, sous le titre Das Parfum, Die Geschichte eines Mörders, puis publié en France en 1986. Il vaut à son auteur un succès mondial. Il a fait l’objet d’une adaptation au cinéma en 2006 : Le Parfum, histoire d’un meurtrier (d’après Wikipédia). Pour en savoir plus, voir ==> ICI