« Le Show de la vie » de Chi LI (note de lecture)
L’auteure, Chi Li, nous fait plonger dans l’intimité d’une famille chinoise prise dans les assauts de la modernité. Individualisme, enrichissement rapide, entreprenariat, drogue, chômage, libération des mœurs… forment les traits que la mondialisation a généralisé à tous les pays. Et ces traits rencontrent, comme partout ailleurs, les caractéristiques singulières de chaque société.
En Chine, les réformes économiques ont ouvert la voie au capitalisme depuis 1978 avec Deng Xiaoping [1]. Mais le Parti Communiste et sa bureaucratie restent très présents. Surtout, la famille demeure la forme majeure qui structure la société. Et ce, depuis des milliers d’années.
« Le Show de la vie » : cous de canard au quartier du Bon-Augure
Le roman montre ainsi la force de la famille, autour de Célébrité, une femme qui vend des cous de canard dans la rue animée du Bon-Augure au cœur de la ville de Wuhan. Une grande ville du centre-ouest de la Chine, que traverse l’immense fleuve Yangzi.
Chaque soir, l’étal de Célébrité ne désemplit pas. On se presse pour boire et manger ses fameux cous de canard jusqu’au petit matin. Elle est un des personnages clé de ce quartier où classes populaires, membres du Parti, nouveaux riches, jeunes dandy, viennent rire, oublier la grisaille du travail, et s’encanailler. Alcool et filles légères.
Le poids des statuts, la marque des origines, continuent d’imprimer leur forte empreinte sur les relations sociales. L’origine paysanne est un lourd handicap. Elle se voit à l’œil nu ! Avec en arrière-plan, la dureté de la vie rurale. Les immigrés de l’intérieur sont prêts à vivre dans l’âpreté de la vie en ville, car ils savent ce qu’ils quittent. Voir « Balzac et la Petite Tailleuse chinoise » ==> ICI)
La famille
Célébrité tient à bout de bras une famille qui se disloque. Drogue, chômage, plongée dans les « libertés » de la modernité. Elle doit contenir ces forces centrifuges pour maintenir un semblant de famille. Elle se bat avec l’Administration pour conserver la propriété de deux chambres dans ce qui fut une grande maison de famille. Célébrité se bat aussi avec ses frères et sœurs. Mais ceux-ci sont trop inconstants pour mener une négociation obstinée avec le Chef du bureau du logement. Célébrité mènera ces batailles avec méthode et intelligence. Elle parviendra à ses fins.
Le seul enfant de la famille
Au fond, son futur, c’est le fils de son frère ainé. Le jeune garçon montre de belles dispositions à l’école malgré un environnement familial déplorable. Ses parents ne s’occupent pas de lui. Pour Célébrité, cet enfant, unique descendant de toute la fratrie, est son espoir. D’ailleurs, c’est elle qui l’a allaité, nouveau-né, alors qu’elle venait de perdre son propre bébé. Elle place tout son futur dans son neveu. C’est pour lui qu’elle travaille, qu’elle échafaude des plans. Elle lui paiera des études à l’étranger quand il sera plus grand.
La liberté
L’auteure décrit avec une extrême finesse la vie de Célébrité, ses réflexions, ses sentiments. Tout en intelligence et en mesure. Elle nous fait partager aussi ce qui la touche dans ses élans. Vie familiale, vie sociale, rapports avec les institutions… Mais aussi, déceptions dans ses rapports amoureux…
Un de ces romans qui apportent à la connaissance de la société chinoise bien plus que tant de rapports et études savantes ! (voir « Beaux seins, belles fesses…et l’académisme » ==> ICI)
Ah, si Célébrité pouvait choisir ! Elle ne se réincarnerait pas en être humain. Elle voudrait vivre en oiseau. Dans la liberté. La vrai liberté. Inaccessible liberté !
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[1] La réforme économique chinoise (chinois simplifié : 改革开放 ; chinois traditionnel : 改革開放; pinyin: Gǎigé kāifàng ; littéralement : « Réforme et ouverture ») fait référence au programme des réformes économiques menées à partir de 1978 en République populaire de Chine (pendant la période « Boluan Fanzheng »). Elle est mise en œuvre par les réformistes au sein du Parti communiste chinois, sous la direction du nouveau chef suprême de la Chine, Deng Xiaoping. Pour en savoir plus, voir ==> ICI
