« Les jours les mois les années » de YAN Lianke
Un conte agro-écolo-philosophique qui nous entraîne dans un village perdu de la Chine rurale
Une terrible sécheresse a décidé les villageois de quitter champs et maisons pour aller chercher ailleurs des cieux plus favorables. Un homme renonce à partir. Il est trop vieux. Il ne soutiendra pas l’effort de la marche. Le vieux reste, seul avec un chien aveugle… à surveiller la pousse d’un unique pied de maïs.
Le vieillard résiste
Sous le ciel de plomb, accablé par les rayons brûlants du soleil, le vieillard organise sa résistance. Pour cela, il mobilise tout le savoir accumulé au long de sa vie sur la terre, l’eau, la végétation, les animaux. Comment respecter et nourrir la terre ? Comment recueillir et préserver l’eau ? Avec quels savoirs faire pousser les plantes nourricières ? Comment éloigner les animaux prédateurs ? Comment affronter les bêtes sauvages ?
Avec son compagnon le chien aveugle, il va se confronter à la faim. En disputant à des armées de rats (des champs) les grains que les villageois ont semé en vain,
avant de renoncer et partir. Il affronte la soif et le puits qui délivre son eau de plus en plus parcimonieusement. Il force la porte des maisons du village à la recherche de quelques réserves. En vain. Les rats viendront après, qui dévasteront le village en rongeant les bois des portes et des meubles, en mangeant
couvertures et vêtements.
Sa victoire sur les loups
Il affronte un loup près d’une source lointaine, que le tarissement du puits l’a obligé à chercher. Le loup quitte la source : un accord entre le vieillard et le loup pour le partage de la ressource a-t-il été trouvé ? L’homme revient vers son village, sa palanche chargée de deux lourds seaux d’eau. Mais, au détour du chemin, se dresse une meute de loups ramenée par le loup éconduit à la source. Un loup-roi, mâle dominant, et huit jeunes et puissants sujets. Le vieillard pose ses seaux et dresse vers la meute le montant de la palanche. Il s’approche doucement. La meute avance elle aussi. À quelques pas de distance, un face à face s’installe. Toute la nuit le vieillard reste sur ces gardes. Au matin, la meute renonce. Elle quitte les lieux. Le vieillard, épuisé, a gagné.
Il a vaincu sa peur. Il ramène l’eau pour le chien et le pied de maïs, tous deux assoiffés.
Les rats apprennent vite
L’eau est maintenant en abondance. Mais elle ne peut éteindre la faim. Le vieillard décide alors de manger des rats qu’il va perdre au piège. Quelques jours de répit pour la faim.
Mais les rats déjouent la manœuvre. Ils ne se laissent plus prendre dans le trou creusé par le vieux. L’odeur de quelques grains de maïs écrasés ne les appâte plus.
L’aïeul invente de nouvelles ruses pour capturer les rats. Mais ceux-ci sont de plus en plus difficiles à prendre.
Les jours, les mois, les années. Le temps s’est disloqué
Depuis combien de temps le soleil brûle-t-il le ciel et la terre ? Depuis combien de temps le vieillard et le chien sont-ils seuls? Le temps de pousse du pied de
maïs leur donne-t-il un indice ? Le vieillard ne sait plus. Il se redresse en rage. Et fouette le soleil de sa cravache.
La nature a été la plus forte
La faim creuse et épuise les corps. Mais le pied de maïs pousse et se gonfle de promesses.
Las. La faim est trop forte. Elle ne peut attendre la maturité du maïs. Le vieillard creuse sa tombe au pied du pied de maïs. Il s’y couche. Son corps apportera à la précieuse plante la nourriture nécessaire. Pour les villageois quand ils reviendront.
Le chien, exsangue, va le suivre. C’est la fin. Le vieillard a lutté jusqu’au bout. Il a mis toute sa connaissance de la nature au service de sa survie et de celle du chien aveugle. Il part sans amertume. La terre elle-même, l’eau, les plantes, les animaux ont cédé devant le feu du soleil. La nature a été la plus forte.
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