La SNCF nous roule dans la farine. Ces derniers temps, j’ai acheté sur Internet des billets de train pour un aller-retour Paris-Luxembourg dans le Grand-Duché. Il me faudra trois trains pour ce déplacement. A l’aller, un TGV de Paris à Metz. Changement à Metz, dans la gare d’architecture massive que l’Allemagne a construit pendant la période où la Lorraine était allemande entre 1870 et 1918. Puis Metz-Luxembourg en Train Express Régional (TER). Retour Luxembourg-Paris en TGV.
Jusque-là, tout va bien.
Trois logiques pour obtenir les billets
Mais pour obtenir les billets, je suis dans trois dispositifs différents (TGV, OUIGO, TER). Des dispositifs « en silo », sans liens clairs entre eux. Ni dans le temps, ni dans l’accès à ces fameux billets.
Les plateformes numériques
Avec force slogans publicitaires, la SNCF nous recommande de nous enregistrer sur les plateformes numériques qui vont nous faciliter la vie. Avec, bien sûr, des mots de passe qui vont s’ajouter aux dizaines d’autres mots de passe que chaque institution veut avoir « pour protéger vos données ».
Les applications sont multiples. « Mon compte SNCF », « Oui SNCF », « Oui GO » et « INOUI ». INOUI, dont la SNCF nous dit que : » TGV INOUI c’est une nouvelle expérience enrichie, confortable, connectée et personnalisée. Découvrez votre nouveau service et réservez votre prochain voyage sur OUI.sncf « . Vous avez compris vraiment ce qu’est INOUI ? Une expérience pour la SNCF. Mais pour les voyageurs ?
Ces applications délivrent (ou pas) des cartes. Quand il y a carte, chacune a un numéro différent qu’il faudra utiliser pour accéder à « mon compte ». En l’associant au mot de passe correspondant. Attention à ne pas mélanger ces mots de passe des comptes multiples de la SNCF.
Les dispositifs des « avantages »
A cela, s’ajoute les dispositifs des « avantages ». En tant que sénior, j’ai une carte du même nom. Et un « Compte sénior » qui offre des réductions complexes. Pourquoi mémoriser ces « avantages » puisqu’ils changent en permanence ? Ah, j’allais oublier mon statut de « Grand Voyageur »
Quand on prend le train en France, on peut avoir 5 statuts
Celui de simple voyageur, sans carte, sans « avantage ». C’est le statut de base, celui de Monsieur Toutlemonde qui prend le train épisodiquement. Il y a ensuite celui de « Voyageur » avec carte et « avantages » limités. On grimpe dans la hiérarchie en multipliant les voyages. On accède alors au statut de « Grand Voyageur » avec carte du même nom. Et « avantages » plus étendus. Un contrôleur m’a laissé entendre qu’il y avait un super statut non public ?!?!?!
Mais attention, le statut de « Grand Voyageur » ne vous autorise pas l’accès au « Salon Grand Voyageur » que la SNCF a ouvert dans les grandes gares. Pour cela, il faut avoir la carte de « Grand Voyageur Plus » ou, encore mieux, « Grand Voyageur Le Club » ! Et quoi, après ? Le paradis ? ?
Et les contraintes sanitaires s’ajoutent à ces complications !
A « Air France », on a fait pareil en créant une série de statuts. Histoire de rétablir dans la tête des citoyens les hiérarchies d’avant ! Et l’esprit [l’imaginaire] qui va avec. Le mot « privilège » est amplement utilisé. Pour flatter les sentiments des clients importants ?
Et attention à la rétrogradation !
Attention ! Si votre rythme de voyages en train faiblit, la SNCF a tôt fait de vous faire passer de « Grand Voyageur » à « Voyageur ». Vous recevez par la poste une lettre alambiquée où on vous explique je ne sais quoi. Inutile de lire le texte écrit par un « communiquant » qui vous raconte que la SNCF agit, là encore, pour votre bien. Pour « améliorer votre confort ». La lettre est accompagnée d’une carte de votre nouveau statut inférieur. Ou pire, on vous supprime carrément votre carte. Vous devenez alors un voyageur sans carte, ni rien. Avec juste votre chapeau et votre valise (aujourd’hui, votre sac à dos).
Que de temps perdu pour s’y retrouver !
Que d’attention à porter pour récupérer les billets : certains sont accessibles sur Internet au moment où vous prenez le billet (le TGV). D’autres seulement 4 jours avant le départ (OUI GO). D’autres « en borne dans la gare », ceux du TER. Mais on vous demande de vérifiez si la gare que vous empruntez possède des bornes. Et sinon, on fait quoi ?
Et c’est sans compter les « OUPS, revenez nous voir » ou autre formule du même genre car le logiciel s’est planté
Quand il vous prend de protester, on vous dirige vers un menu du site. Des cas de réclamation préenregistrés sont énumérés qui seront traités par des robots. Je ne coche pas ces cases.
Vous accédez enfin à un espace où vous pouvez vous exprimer. Je le fais avec politesse, en espérant que c’est un être humain qui lira ces quelques lignes. Je clique.
Mais Oups, il ne se passe rien. Le message est perdu dans le monde sidéral du numérique. Ce sont les « limbes » digitales [1]. Personne au bout ne lira ces mots de réclamation.
Est ce qu’il y a quelqu’un à la SNCF chargé de penser ces dispositifs ?
D’en assurer la coordination ? La cohérence ? De prendre en compte l’usager (pardon, le client) dans ces changements incessants ? Tous présentés comme effectués pour améliorer votre situation ?
Les dirigeants de la SNCF pensent-ils que les astuces de la communication peuvent combler l’écart qui se creuse entre la population et leur entreprise ? Il faut dire que celle-ci n’a pas le monopole de ces pratiques.
Pour ce voyage au Grand-Duché, j’ai terminé mon message par :
« De grâce, gérez en interne les connexions complexes établies entre les différentes sociétés qui gravitent autour de la SNCF en créant une interface client simple, unifiée et stable. Merci. »
Mais OUPS ! Le message n’est pas parti. Panne de l’application !
Pour qui roule la SNCF ?
La SNCF multiplie les plateformes, les dispositifs, les applications, les « avantages » à son seul profit. Elle se moque de ses « clients ». Elle a oublié ses « usagers ». Ce n’est plus un service public. Pour qui roule-t-elle en réalité ?
Décidément, j’aime le train. Mais je n’aime pas ce qu’est devenue la SNCF !
(voir sur ce point ==> ICI)
& & &
[1] Dans la religion catholique, la doctrine des limbes (du latin limbus, « marge, frange ») désigne un état de l’au-delà situé aux marges de l’enfer. Par extension, ils désignent un état intermédiaire et flou. Voir ==> ICI
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2 Commentaires
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Bonsoir Jacques,
C’est même pire que tout! SNCF = honte;
Je voyage en train toutes les semaines depuis 30 ans;
Un exemple ce soir:
– je compte demain me rendre à La Ferté sous Jouarre. Heureusement je sais qu’il y a une gare et des trains
Le site « oui » ne reconnait pas La Ferté , puis après un passage par le site TER, on m’indique qu’aucun train ne circule demain pour la Ferté.
Etonnant! je consulte le site de la DB (Deutsche Bahn, la compagnie de chemin de fer d’Allemagne), vieux réflexe de cycliste, qui indique les horaires. Effectivement le site « oui » est en rade sans prévenir les voyageurs préférant signaler une absence de trains.
– je n’ai pas regardé le prix, je suppose de l’ordre de 20 euros, c’est à dire le prix de l’avion que mon fils prendra vendredi 12 entre Bruxelles et Bordeaux. Je n’ose pas consulter le prix en train du Bruxelles-Bordeaux, en général proche de 150 euros pour un adulte sans carte. Je vais vérifier quand même.
Et on parle de limiter les trajets en avion pour privilégier le train. Cela ne tient pas debout dans le cadre actuel. Service nul, prix déments et malheureusement je n’ai pas le choix, je voyage en train; Un aller -retour Paris- Bruxelles pour 4 personnes revient à 800 € hors achat 2 mois à l’avance. Qui n’utiliserait pas sa voiture pour transporter sa famille?
– pourquoi le site de la DB? la SNCF n’a que récemment mentionné dans ses horaires la possibilité ou non de voyager en France avec son vélo, contrairement à la DB qui couvre toute les trains en Europe depuis longtemps.
– Consultant des horaires fréquemment, je me suis rendu compte qu’il fallait quelquefois décomposer son voyage pour obtenir un tarif non léonin (Paris – Lille puis Lille – Bruxelles) voire même pour aller à Bruxelles, ne pas se fier aux horaires qui indiquent les THALYS chers mais omettent de temps en temps le train IZY moins cher. Sur Bruxelles-Valence TGV ou toute gare du Sud, tu gagnes 30€ en décomposant, sans changer de train, juste de place, à Lille.
Quant aux portiques, qui marquent l’interdiction dans les gares parisiennes pour les accompagnants d’accéder sur les quais pour aider un proche, c’est scandaleux.
Bien entendu THALYS/IZY, filiale de la SNCF, qui a financé le Congrès européen des cyclistes, interdit absolument le transport d’un vélo entre Paris en Bruxelles et il n’y a pas d’alternative en train sauf pour les bourgeois comme moi d’acheter un vélo Brompton pliable. Quant à la mise en œuvre de la directive européenne qui oblige les transporteurs à avoir des espaces vélo dans les TGV, la SNCF et THALYS profitent d’une dérogation. Il y aurait moins de places assises or le but est de tasser.
Si une concurrence s’ouvrait comme dans l’aérien, peut-être les tarifs de la SNCF baisseraient-ils ou son service s’améliorerait?
Comme tu le dis, Je voyage en train depuis si longtemps avec un déplaisir grandissant, je regrette même le temps des amendes quand je prenais le train avec mon vélo, au moins tu pouvais y accéder… et négocier le montant de l’amende …ou pas…avec un contrôleur souvent compréhensif.
Bonne soirée, Georges
La photo est superbe
Ah oui c’est bien vrai, la SNCF ce n’est pas la même chose que le train. C’est devenu un pataquès effroyable et inhumain, comme bien d’autres entreprises soi disant publiques…