Ongle de l’auriculaire et pieds bandés. Je rapproche dans ce texte ces deux pratiques sociales profondément ancrées dans les siècles. Deux marques de distinction sociale. L’une, cruelle et mutilante, a été imposée aux femmes de la haute société chinoise. Les hommes y trouvaient, de plus, un attrait érotique chanté par les poètes. L’autre, simplement décorative et sans douleur, marque visible du non-travail, donc de l’élévation sociale, a été le fait des hommes de nombreuses sociétés de la planète.
Pieds bandés pour les femmes chinoises de la haute société
Pendant mille ans, les femmes de la haute société chinoise se faisaient bander les pieds [1]. Cette pratique symbolisait la richesse et la distinction sociale. Elle produisait en outre un puissant attrait érotique pour les hommes.
Les pieds bandés des femmes ainsi traitées s’atrophiaient dans d’immenses douleurs. Improductives, dépendantes, les femmes aux pieds bandés ne pouvaient travailler qu’à des tâches domestiques simples. Ce que ne pouvaient se permettre les familles pauvres où hommes et femmes effectuaient de rudes travaux dans les champs.
Avoir les pieds bandés était une condition pour réaliser un mariage aisé dans sa classe sociale.
L’ongle de l’auriculaire, un attribut valorisant
Dans l’empire ottoman, mais aussi dans bien d’autres lieux, les hommes à statut élevé devaient signifier au vu de tous qu’ils tiraient leur richesse de leur rang dans la société. Et non de leur travail, assimilé à une activité manuelle vile, réservée aux couches inférieures de la société.
Pour se faire, ils se laissaient pousser l’ongle de l’auriculaire. Constituant ainsi une marque intangible, visible, de leur éloignement total du travail manuel. Travail qui aurait pu casser cet attribut. Voir le texte sur ce site ==>ICI
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[1] La coutume des pieds bandés fut pratiquée en Chine du Xe au début du XXe siècle sur les filles et jeunes femmes issues des classes sociales favorisées dans un premier temps. Avant de s’étendre à une part plus large de la société chinoise. Après plusieurs vaines interdictions, à la fin du XIXe siècle, la Société pour l’émancipation des pieds popularisa l’opposition à cette pratique. Celle-ci est interdite en 1912 après la proclamation de la première république. Ce sont les autorités communistes qui élimeront réellement cette pratique au début des années 1950. (Wikipédia). Pour en savoir plus, voir ==>ICI
Sur la disparition de cette pratique, on lira avec intérêt la thèse d’Anthony Appiah dans Le code d’honneur : Comment adviennent les révolutions morales. 2011, Ed Gallimard, Paris.
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