« Magellan » de Stefan ZWEIG. L’auteur met toute la force de son écriture au service du récit de la vie (et de la mort) du grand navigateur. Au début du XVI° siècle, Magellan, petit noble portugais qui se met au service du roi d’Espagne, va être le premier homme à mener une expédition maritime qui fait littéralement le tour de la terre. Il réalise cet exploit quelques décennies après la « découverte » par Christophe Collomb du continent qu’on allait appeler Amérique.

L’histoire de Magellan se confond avec le grand affrontement entre les deux premières puissances qui dominaient les océans à l’époque. L’Espagne et le Portugal, en une première mondialisation. Une mondialisation qui a pris, dès le début, la couleur de la domination. Une domination à l’assaut des îles aux trésors fabuleux en épices et en or du Sud Est Asiatique. L’Espagne a parié sur la route de l’Ouest, avec l’exploit de Christophe Collomb en 1492. De son côté, le Portugal a « découvert » l’Asie lointaine et ces îles en passant par l’Est. Vasco de Gama a doublé, en 1498, le continent africain par le Sud au Cap de Bonne Espérance.

« Au commencement, étaient les épices »

On a peine à imaginer le rôle qu’ont pu jouer le désir d’épices en Europe à la fin du Moyen Âge. Stephan Zweig décrit cet attrait, alors que la nourriture de l’époque en Europe rivalisait de fadeur. La découverte du poivre, de la cannelle, des clous de girofle… a ouvert un nouveau monde dans les goûts des élites des pays de la chrétienté. Ces épices étaient jusque-là l’apanage de quelques-uns. Le poivre se vendait au grain. Il pouvait être pesé sur une balance de bijoutier ! Les commerçants arabes et vénitiens (ces derniers en Méditerranée) avaient acquis le monopole du commerce de ces produits. Commerce qui permettait d’accumuler des fortunes colossales. Les magnificences de Venise en témoignent.

La connaissance du monde s’était obscurcie au Moyen Âge

Comment contourner ce verrou arabe et vénitien ? Selon Stefan Zweig, le savoir maritime s’était fortement réduit pendant les années sombres qui ont suivi la chute de l’Empire romain. (p 32) « … le Moyen Âge a oublié tout ce que les Phéniciens, les Grecs, les Romains savaient en cosmologie. L’expédition d’Alexandre jusqu’aux confins de l’Afghanistan et même de l’Inde est tenue pour légendaire. Les excellentes cartes, les globes des Romains sont perdus. Leurs chaussées, jalonnées de bornes militaires, qui pénétraient jusqu’au cœur de l’Angleterre et de la Bithynie[1], sont oubliées. On a désappris à voyager, la joie de découvrir est morte, la science de la navigation est retombée en enfance. Sans cartes et sans boussole, sans but vaste ni hardi, de frêles esquifs pratiquent un timide et mesquin cabotage de port en port, avec la crainte continuelle des tempêtes ou des pirates, plus redoutables encore. »

Un immense effort de cartographie est entrepris alors dans le Sud-Ouest l’Europe, à partir du XV° siècle. Le dessin de conquête du monde, confus, est déjà présent.

Pour atteindre l’Inde et au-delà, ce sont les Portugais qui ont trouvé la première voie. Celle de l’Est. En contournant l’Afrique par le Sud. Et ce, 6 ans à peine après la découverte d’une route de l’Ouest par Collomb… Ce dernier a découvert une voie qui a conduit, non pas aux Indes, mais à ce qui est aujourd’hui nommé Amérique. Cet immense continent qui barre la route de l’Ouest, de l’extrême Nord à l’extrême Sud.

Existe-t-il une autre voie pour rejoindre l’Inde ?

Une autre voie pour accéder aux fabuleuses richesses en épices des îles des Moluques dans le Sud-Est asiatique ? Si cette voie existe, alors la terre est sphérique. Et non pas une plate étendue de terre et de mer aux confins incertains et terriblement dangereux[2].

La partition du monde entre Espagne et Portugal

Les deux puissances maritimes de l’époque vont-elles s’affronter pour le partage du monde ? L’Espagne et le Portugal, « enfants chéris » de l’Eglise, ne doivent pas entrer en conflit. Le Pape s’y emploie.

Le partage est organisé sur une ligne verticale, un méridien, qui passe au milieu de ce qui est aujourd’hui l’Amérique latine. Tout l’espace à son Ouest est attribué à l’Espagne, après la « découverte » de l’Amérique par Christophe Collomb. Au Portugal, sont attribués les espaces à l’Est après le contournement de l’Afrique par Vasco de Gama. C’est le pape, auto proclamée puissance spirituelle régnant sur l’ensemble du monde, qui officie et partage ces deux parties de la terre en 1493. (p 43) « A la petite Espagne, la gigantesque Amérique. Au minuscule Portugal, les Indes et l’Afrique. »

Le Portugal a obtenu par la négociation une rectification qui lui permettra de s’attribuer le Brésil, pourtant à l’Ouest.

A l’Est, les flottes et troupes portugaises brisent par le fer et par le feu les résistances des sultans musulmans qui avaient jusque-là la main sur le commerce de cette région du monde. Le port de Malacca est pris en 1511. Les « découvertes » par le Portugal de l’Asie, jusqu’au Japon, sont magnifiquement racontées par l’aventurier portugais Fernao Mendes Pinto dans « Pérégrination ». Voir la note de lecture ==> ICI

« Magellan » de Stefan ZWEIG. Couverture du livre

La conquête de l’Est, au-delà des épices

La partition du monde laissait totalement inconnu la ligne méridienne opposée, l’antiméridien de celui qui avait été tracé par le Pape. Cette ligne indéfinie qui se trouve dans l’actuel Océan Pacifique. Les Moluques sont elles du côté du Portugal ou de l’Espagne ? Personne ne peut répondre à cette question avant l’expédition de Magellan.

La colonisation commence alors, ouvrant une nouvelle page dans l’histoire de l’humanité. Le premier modus operandi est classique. (p 47) « C’est ainsi que le 25 mars 1505 marque le début d’une ère de colonisation dont l’activité se déroulera invariablement en trois temps. Le même processus se répétera pendant des siècles. On construit d’abord une factorerie[3], puis une forteresse soi-disant pour la protéger. En premier lieu, on se livre à de pacifiques échanges avec les souverains indigènes. Ensuite, dès qu’on a suffisamment de soldats, on spolie tout bonnement ces princes de leurs Etats et l’on s’empare des denrées du pays. »

Le capitalisme mondialisé fait alors ses premiers pas. Des profits gigantesques s’acculent, basés sur l’énorme différence de prix des épices achetées dans les Moluques à très bas prix et revendus « littéralement » à prix d’or en Europe.

Comment atteindre les îles de cette Asie du Sud-Est ?

La route par l’Est est bien tenue par les marins portugais. L’idée d’une voie par l’Ouest est présente d’une façon floue car nous sommes alors « au-delà des limites des cartes ». Magellan va s’en saisir. De 1505 à 1512, il a déjà sillonné, comme marin et simple soldat sous les ordres du roi du Portugal, les îles de l’Asie du Sud Est. Il a aussi participé, sous les mêmes couleurs, aux expéditions militaires au Maroc pour assoir les positions portugaises au Nord de l’Afrique. Dans toutes ces actions, toutes ces batailles navales et terrestres, il a reçu des blessures, dont une au genou qui va le faire boiter tout le reste de sa vie. Mais il revient en ayant appris le combat, la géographie, l’astrologie et la navigation. Et la conduite des hommes ! Il amène des Moluques à Lisbonne un jeune esclave, Henrique.

Magellan conçoit alors le projet de gagner les Îles Moluques… par l’Ouest. Il passe des années à préparer son projet. Mais son souverain, Manoel le roi du Portugal, refuse la proposition de ce petit nobliau sans poids dans la cour des puissants à Lisbonne.

Lisbonne, capitale de la première mondialisation

(p 67) « Grâce à la conquête des Indes, Lisbonne, la petite Lisbonne, est maintenant un centre mondial, une capitale luxueuse. Assises dans des carrosses découverts, les dames de la noblesse exhibent leurs perles des Indes. Cependant qu’une multitude de courtisans superbement vêtus se pavanent dans le palais. Magellan constate qu’une merveilleuse alchimie a converti en or le sang que ses camarades et lui ont versés aux Indes. »

Magellan va alors proposer son plan au jeune roi d’Espagne

Son projet de contourner le globe terrestre est plus grand que sa fidélité à son roi. C’est ainsi que Stefan Zweig nous parle de son « passage » du Portugal à l’Espagne. Il possède une information secrète sur une voie vers le grand océan (qu’il nommera « Pacifique »). Mais si ce passage existe, ce qui n’est pas sûr, sa localisation est alors fausse. Magellan le situe à hauteur de la large baie du lieu qui sera appelé Rio de la Plata.

Il part à Séville pour construire, depuis cette base, son projet. Il s’y fait des alliés. Epouse la fille d’un homme puissant. Prend tout son temps pour murir et préparer cette expédition. Et d’abord, arracher le soutien du roi.

Charles, le futur Charles Quint, va accepter ce plan audacieux

Magellan a dû jouer de patience et de ruse pour convaincre les principaux conseillers du roi de s’engager dans cette aventure. Non sans provoquer des fortes jalousies qui vont s’avérer funestes lors de l’expédition. Il obtient 5 navires. Le roi va nommer des capitaines espagnols pour accompagner Magellan. Mais dès le début, le petit officier portugais, va douter de la fidélité de ces grands nobles castillans qui vont l’accompagner dans cette terrible aventure.

Magellan passe alors à la préparation minutieuse de son expédition

Réparer les 5 navires. Les équiper de tout ce qui est nécessaire pour un voyage dont on ignore la durée. Recruter un équipage de 250 hommes à qui il faut faire miroiter la fortune… sans dévoiler la véritable nature du projet…

Et surtout, surmonter les innombrables pièges que lui tendent tous ceux qui veulent l’échec de ce projet. Manoel le Roi du Portugal en premier. Il lui envoie un diplomate qui tente de le faire revenir à Lisbonne et le menace en cas de refus. Magellan tient bon et voit son soutien renforcé auprès du roi Charles. Mais d’autres pièges lui sont tendus. D’autres provocations achèvent de tremper sa volonté dans les plus dures épreuves… Avant celles qui s’accumuleront sur sa route.

Le départ, en ce 20 septembre 1519

Magellan, l’amiral de la flotte composée de 5 vaisseaux, va adopter une conduite autoritaire et taciturne. Les autres capitaines vont être désorientés par cet homme qui conduit l’expédition sans partager la moindre information. Les capitaines des autres bateaux sont là pour obéir.

L’interminable descente vers le Sud et vers le froid

La côte de ce qui deviendra le Brésil est atteinte. Une escale est faite pour reposer l’équipage et refaire de l’eau. La descente vers le Sud reprend. Interminable. L’échancrure attendue est atteinte… Mais, hélas, elle ne conduit pas « de l’autre côté ». L’eau est douce : c’est seulement le très large estuaire d’un grand fleuve. Magellan reprend la descente vers le Sud. Le climat devient de plus en plus froid. Les terres de plus en plus vides de vie. Un moment, quelques êtres apparaissent. Ils ont « des grands pieds ». Les explorateurs nomment ce lieu « Patagonie », le pays des « hommes aux grands pieds ».

Les hommes de l’expédition vont capturer deux d’entre eux

Ramener en Espagne des individus de ces contrées, Magellan s’y est engagé dans le contrat qui le lie au roi Charles. Il fait capturer deux de ces « géants ». Et pour saisir deux de ces hommes, il les couvre de cadeaux (miroirs, clochettes et autres babioles) de telle sorte que leurs mains soient totalement occupées à tenir ces objets, pendant qu’on leur attache, pour les amuser, des clochettes aux chevilles…. Mais aussi des fers qui vont les immobiliser. Stefan Zweig nous présente là, avec ses mots, la métaphore de la capture par le capitalisme des individus attirés par le mirage des objets et rendus impuissants par leur accaparement. Une pratique toujours actuelle, plus sophistiquée il est vrai.

La mutinerie

Les capitaines espagnols demandent en vain à Magellan des explications sur la route suivie. La descente vers le Sud, en longeant la côte de ce qui sera nommé le Brésil puis l’Argentine, est éprouvante. Des tempêtes secouent les navires. L’un d’eux, envoyé pour explorer une nouvelle échancrure dans la côte, se fracassera sur des récifs. Le froid éprouve les équipages. De longs mois se sont passés, le niveau des réserves de vives est bas. Magellan décide de réduire les rations de biscuit et de vin.

 

« Magellan » de Stefan ZWEIG. L'Amérique du Sud à contourner
L’Amérique latine et les deux « passages ». Flèche rose, le passage erroné. Flèche jaune, le passage effectif qui prendra le nom de « Détroit de Magellan ».

 

Les capitaines espagnols se rebellent. Ils prennent le contrôle de 3 des 5 bateaux. Par une ruse inouïe, Magellan reprend l’avantage et débarque deux des félons sur la rive. Les autres capitaines se plient à sa volonté. La descente vers le Sud glacial continue. Pas question de renoncer. De rejoindre l’Inde par le Sud de l’Afrique, la route sûre, déjà éprouvée, à l’Est.

Une ouverture se présente !

C’est un passage d’une incroyable complexité. Un méandre de voies. Un dédale de voies inextricable. Un labyrinthe que Magellan aborde sans carte, dans l’incertitude totale sur l’issue de ces errements. Au loin, sur terre, la nuit, des hommes allument des feux. C’est ce qui donnera le nom à cette région : « La terre de feu ». Aujourd’hui partagée entre le Chili à l’Ouest et l’Argentine à l’Est.

« Magellan » de Stefan ZWEIG. Le Détroit
Le labyrinthe de ce qui deviendra le « Détroit de Magellan »

 

Magellan navigue à vue avec les 4 bateaux qui restent de son expédition. A chaque bifurcation, il divise sa flotte pour cherche la bonne voie. Lors d’une de ses explorations, l’un de navire fait défaut. Il a quitté l’expédition pour rentrer en Espagne, trahissant son amiral. C’est un coup très dur pour Magellan et pour l’équipage. Celui-ci est épuisé, les vivres sont fortement rationnés.

Enfin, le grand Océan !

Magellan finit par sortir, avec 3 de ses bateaux, du labyrinthe. L’Océan s’ouvre à lui et aux hommes qui l’ont accompagné jusqu’ici. Les navires entament alors une longue traversée vers le Nord-Ouest, pleine d’incertitude. Aucun occidental n’a franchi jusqu’alors ces immenses étendues d’eau. Surtout, avec des bateaux fragilisés par les tempêtes et avec un équipage épuisé. L’Océan est calme (d’où le nom de « Pacifique » que Magellan lui donnera). La vitesse est très lente. Plus de trois mois seront nécessaires pour que du grand hunier retentisse les mots attendus : « Terre ! Terre ! »

L’amiral Magellan pense que ce sont les îles Moluques. Mais ce ne sont que des petites îles de l’archipel des Philippines. Qu’à cela ne tienne ! Elles tombent dans le champ de l’Empereur d’Espagne. Et Magellan devient gouverneur de deux des îles « découvertes ».

Mais surtout, l’équipage épuisé trouve un repos mérité, de l’eau et de la nourriture en abondance !

Sur une des îles, un « miracle » se produit. Henrique, l’esclave que Magellan avait acheté à Malacca, reconnait dans le parler des habitants des mots de sa langue. C’est la preuve irréfutable que ces bouts de terre sont en lien avec les îles tant recherchées !!!

C’est ainsi que Henrique, l’esclave malais, est le premier être humain à effectuer effectivement le tour de notre planète !

Premiers actes de domination

La population de ces petites îles se laisse convaincre de s’incliner devant ces bateaux dotés de canons redoutables et d’êtres si bien protégés par leurs armures. Les verroteries font, au début, leur effet. Mais quand on aborde une île plus importante où la population a déjà été en contact avec les marchands arabes et portugais, les choses changent.

Magellan, d’une façon que Stefan Zweig estime plus respectueuse que ne l’ont été celles des dominateurs précédents (Collomb, Pizarro, Cortes…), cherche à passer des accords avec les rois locaux. Une domination plus en douceur, en quelque sorte. Avec l’ambition qu’elle soit, de ce fait, plus durable. Mais on voit aussi que cette domination s’est menée face à une résistance des populations locales.

Stabiliser cette domination au profit de l’Empereur

L’amiral Magellan propose aux rois locaux des « accords » de reconnaissance de la souveraineté de l’Espagne sur leurs territoires. Et, plus difficile, il cherche à stabiliser cette domination espagnole. Il institue alors un des rois qui s’est soumis à l’Empire d’Espagne, prince de tout l’archipel. Il entend alors menacer tout ce qui pourrait s’opposer à ce « prince ». Lors d’une confrontation avec la population d’une île qui refuse cet arrangement, il meurt avec des officiers et soldats espagnols dans une escarmouche où les mousquetons et la poudre ne parviennent pas à venir à bout des arcs et des flèches des habitants.

Ainsi, l’intrépide Magellan est tombé alors qu’il a prouvé, après d’infinies souffrances, la rotondité de la terre. Et a conquis, pour le compte de l’Empereur d’Espagne, Charles Quint, d’immenses territoires. Ces conquêtes se déroulent sur un mode de domination incontestable pour lui et son équipage. Quel petit roi local pourrait s’opposer à l’Empereur d’Espagne agissant avec la bénédiction du Pape ? Cet empereur fût-il à l’autre extrémité de la terre !

L’expédition a perdu son chef

L’expédition est décapitée. Outre Magellan, les capitaines d’origine ont été tués. La redistribution des pouvoirs donne la direction des opérations aux officiers en second. Les bateaux fuient rapidement cette île si meurtrière, et vont zigzaguer des mois durant, sans direction claire, à la recherche des fameuses Iles Moluques.

Selon Stefan Zweig, les hommes restant de l’expédition se comportent comme des brutes avec les populations locales. Notamment vis-à-vis des femmes. Rien n’est bâti pour l’empire.

Les trois bateaux restants finissent par trouver les Moluques et s’y approvisionnent d’un lourd chargement d’épices. On embarque vingt-sept tonnes de clous de girofle. Une immense fortune s’ils parviennent à ramener ce chargement en Espagne !

Le retour est périlleux

Un des bateaux, trop fragilisé par la longue navigation, est abandonné et brulé. Il reste donc deux navires. Il est alors décidé que l’un rentrera vers Panama pour rejoindre des terres « espagnoles ». Tandis que l’autre rentrera par la route « classique ». C’est-à-dire par le Cap de Bonne Espérance, en contournant l’Afrique. Le premier échoue, retourne vers les Moluques. L’équipage est capturé par les Portugais, le bateau est démantelé.

Sur l’autre route, une énorme difficulté. La route par le Sud de l’Afrique « appartient » au Portugal, et ils doivent la faire sans escale ! Au risque de se faire capturer, eux et leur précieuse cargaison, par les Portugais qui veulent se venger de Magellan « le traitre ». C’est l’ultime exploit demandé à l’équipage.

Enfin, le retour à Séville

Le bateau où 18 hommes exténués s’affairent à maintenir la navigation, arrive enfin en Espagne. C’est l’un des officiers qui avait participé à la tentative de mutinerie lors de la phase atlantique de l’expédition qui commande le bateau rescapé. C’est donc ce personnage qui est accueilli, avec le reste de l’équipage, en héros. L’empereur les reçoit.

Le navire qui avait rebroussé chemin, quittant l’expédition juste avant la découverte de la passe vers le Pacifique, est bien revenu à Séville. Ses officiers sont blanchis de toute trahison.

Magellan n’est pas là pour témoigner. Un autre récit se forge. Le rôle de Magellan s’efface.

Finalement….

Le détroit que le hardi navigateur a découvert portera son nom. C’est le « Détroit de Magellan ». Mais cette route restera et reste extrêmement dangereuse. Elle ne constituera pas une route commerciale. Les échanges avec l’Inde passeront par le contournement de l’Afrique… avant le percement du Canal de Suez à la fin du XIX° siècle.

Ce que Magellan a apporté, c’est une découverte scientifique. Par la preuve tangible de la rotondité de la terre. (p 224) « Ce que les savants supposaient depuis des milliers d’années est devenu, grâce au courage d’un individu, une certitude : la terre est ronde et voici un homme qui vient d’en faire l’expérience. » Un apport immense à la connaissance, chèrement payé.

La mondialisation, le Sud et le Nord

En un récit captivant, Stefan Zweig nous rapproche de cet homme, de son audace, sa ténacité, dans le monde du début du XVI° siècle. Une époque où se forge la certitude tranquille du droit « naturel » à dominer le monde, dans le sud-ouest de l’Europe. Le début d’une longue histoire de domination qui s’achève, en ce XIX° siècle, dans l’incertitude.

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Stefan Zweig, né en 1881 à Vienne en Autriche-Hongrie et mort en 1942 à Petrópolis au Brésil, est un écrivain, dramaturge, journaliste et biographe autrichien. Wikipédia. Pour en savoir plus, voir ==> ICI

Fernand de Magellan, né vers 1480 probablement à Porto et mort le 27 avril 1521 sur l’île de Mactan (actuelles Philippines), est un navigateur et explorateur portugais de l’époque des grandes découvertes. Il est passé au service de la Couronne de Castille, avec le projet d’atteindre les Indes orientales, notamment les îles Moluques en Indonésie, en naviguant vers l’Ouest, ce qui était le projet inabouti de Christophe Colomb en 1492. Magellan espère donc trouver un passage de l’océan Atlantique à l’océan oriental auquel il donnera le nom d’océan Pacifique. Sur la vie de Magellan, on trouvera des compléments sur Wikipedia. Voir==> ICI

[1] La Bithynie est une région historique de l’Asie Mineure située sur la côte nord, à l’Est du détroit du Bosphore. D’après Wikipédia.

[2] Une bonne partie des savants et même de l’Eglise admettait la sphéricité de la terre.

[3] Factorerie : autrefois, comptoir ou agence d’un établissement commercial ou industriel à l’étranger, plus spécialement dans les anciennes colonies africaines. Comptoir commercial ou colonial, territoire et structure établis le plus souvent par des marchands étrangers ou une puissance coloniale dans les points stratégiques d’un pays afin de favoriser le commerce international avec les marchands locaux. Wikipédia


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